Résidence Utopiana


Utopiana     Récits de terrain     Types de rendus



Matériel : "Promener son deuil" une carriole pour deuil transportable

Nous ne portons plus le deuil sur nous. Plus d'habits noirs, plus de brassards, rien ne montre que notre coeur est en chagrin. Une fois le rituel de la cérémonie funéraire passé, chacun·e revient à ses habitudes, il y a des temps formels et informels pour se retrouver et parler de la personne morte, éventuellement aller voir la personne au cimetière ou à l'endroit où elle repose, mais le chagrin quotidien devient rapidement très solitaire. Alors je me suis dit que l'on pourrait faire une petite cariole qui pourrait contenir une urne, mas forcément remplie, cela pourrait être un objet symbolique, qui signifierait que l'on porte un deuil, que l'on tire ce poids et que l'on aimerait bien que d'autres nous accompagne le temps d'un trajet. D'ailleurs cela pourrait être le deuil d'une personne, d'un lieu, d'un autre animal.

Yves, il est designer et il va bientôt concevoir son cercueil basé sur celui qu'il vient de créer pour son papa. Il a parlé avec ses parents de leurs directives anticipées. Il a ainsi créé deux urnes qui s'accrochent l'une à l'autre et un cercueil pour son papa qui souhaite d'abord être dans un cercueil pour que l'on puisse le veiller et lui dire au revoir, puis être incinéré et mis dans l'urne. Pour tester les dimensions, Yves s'est mis dans le cercueil de son papa. Souvent les gens ne veulent pas parler de tout cela par peur que la mort les entendent et viennent les chercher plus vite. C'est vrai que moi dès fois quand je réfléchis à acheter ma concession de mon vivant ou à faire un prototype de ma tombe, j'ai un peu peur que mon inconscient comprenne qu'il y a un message caché.


Dessiner une carte : le cimetière idéal

Faire exister un lieu utopique en créant une cartographie précise des différents espaces et de la manière dont ils sont intercalés avec des espaces de vie. Un cimetière avec des gens, des animaux, des vivant·es, des mort·es.

J'ai essayé d'expliquer mon idée à ChatGPT en lui demandant de générer une image inspirée par la carte de la Vallée des moulines dessinée par Tove Jannsson. Je lui ai dit que je souhaitais un lieu où les autres animaux puissent être enterrés avec les humain·es de manière mélangée, que l'on puisse être à côté de ses ami·es et pas qu'en famille, qu'il y ait des personnes vivantes qui lisent dans le cimetière. La première image était trop structurée alors je lui ai demandé d'en générer une plus chaotique et là il s'est un peu perdu.


Matériel : créer ma tombe prototype

Quand le Facteur Cheval a su qu'il ne pourrait pas être enseveli dans son palais, il a acheté une concession au cimetière de son village et il a créé son propre mausolée. Créer un prototype de ma propre tombe me permettrait de m'assurer un lieu à mon image et comme je l'ai décrit sous "cimetière Nyon" de me présupposer une après-vie corporelle pas trop solitaire.

Quand ma chatte est morte, j'ai l'impression de ne pas avoir maîtrisé grand chose, On m'a proposé l'incinération, Je l'ai gardée quelques semaines dans une petite boîte avec moi, boîte qui m'avait été envoyée par la poste, puis je l'ai enterrée dans le jardin de ma maison d'enfance où je vivais à nouveau à l'époque. En fait, j'aurais bien voulu que l'on se retrouve au même endroit. Je trouverais moins régressif que d'être enterrée avec mes parents. Ou alors avec ma grand-mère mais elle est à côté de mon grand-père qui était un homme peu aimable. Et l'endroit est très moche. Et je crois pas que l'on m'autoriserait à être enterré dans un cimetière pour "animaux". Dans sa nouvelle “Une veillée pour un wombat: in memoriam Birubi”, Val Plumwood raconte qu'elle a organisé une cérémonie pour son ami Wombat. Elle explicite aussi le tissage de leur amitié. Tout semble cohérent. Ici, lorsqu'un animal mort,il est considéré par la loi comme un "déchet".